Art numérique (1997 - 2009)


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« Les émotions créatrices » : De l'importance des émotions dans la création « de soi », au sens large - et dans l’Art numérique, en particulier.

Il y a 25 ans, en 1998, pourquoi avoir eu la vision d’un environnement immersif, sorte de poche membranaire à taille humaine, « enactive » par la physiologie, sa traductibilité émotionnelle, et par le toucher ? Régression fœtale dans le ventre de la mère ? Là où les premiers engrammes se formulent dans l’organisme des créatures sentientes ? L’affectivité commence au moment-même où la mère accepte son enfant, ou non. Cette expression proto-émotionnelle canalise notre relation originelle au fondement dans le yin primordial qui nous relie à l’incarnation, à la terre. La qualité des germes émotionnels manifeste alors le bon enracinement et le juste alignement - en « voie du milieu », ou non.

Tout comme dans la création ou encore dans la méditation, les émotions signifient l’ancrage en soi-même au niveau archaïque de l’instinct et à celui plus évolué de l’intuition. Ce contact émergent, essentiel avec soi-même, est celui de la synchronisation liante « corps - mental - environnement », dans le moment présent. Il conduit à la justesse de chaque « geste créatif » dans l’affirmation de nous-même et à notre avènement au monde dans son impermanence, existentielle. L’émotion - vive, intense, éphémère - conduit au sentiment de vacuité, en ce que celle-ci comporte de plein et de vivant.

Dans l’interaction émotionnelle, l'autre nous déclenche à l'endroit de nous-mêmes, en profondeur de co-création ou de co-naissance. À deux, nous jaillissons au monde et, par nous, le monde jaillit en lui-même. Dans le charivari tumultueux des images, des émotions et des sensations, il y a chaque fois émergence de perceptions nouvelles et affleurement d’un paradigme de résolution intégrative « supérieure ». Ainsi, tant sur le plan onto- que phylogénétique, lentement y a-t-il « évolution créatrice ».

Pour cela, la pratique par le visiteur-acteur des dispositifs numériques dits « émotionnels » implique de sa part un éveil et une expertise de type « méditatifs » — afin de se déclencher au niveau le plus accompli, et néanmoins toujours spontané, d'un savoir-faire éthique. Car, ici, je ne privilégie que la perspective et la promesse d'une écriture future « relationnelle », faisant écho à celle d’une conversation du cœur, préconsciente et non-verbale.

Anika Mi, sept. 2023 — sur une sollicitation de Léa Dédola - Docteure en Etudes audiovisuelles et cinématographiques.
Ouvrage aux Eds Presses des Mines : "Les émotions dans les créations artistiques : Arts interactifs et films de réalité virtuelle". (parution : février 2024)

« En 1999, une version de "Corps Fœtal - Corps Mental" de Anika Mi a été modélisée en images de synthèse, visant à plonger le visiteur-acteur dans une membrane organique, gonflable, dite-immersive, jouant de multiples créations visuelles et sonores, afin de produire des stimuli émotionnels.

L’œuvre utilisait des bio-senseurs, mesurant le débit sanguin périphérique, la conductance cutanée, l’état thermovasculaire et la fréquence respiratoire du participant. Grâce à un scanner émotionnel fonctionnant en continu à partir de la dimension d’activation, l’œuvre restituait et traitait les différentes composantes physiologiques. Aussi, dans la version originelle de l’oeuvre, lorsque le participant touchait la peau de cette membrane, des sons se déclenchaient et, sur la paroi, des images apparaissaient. Ces nouveaux stimuli, exogènes, étaient conçus pour venir alimenter l’activation émotionnelle du participant : par exemple, si celui-ci était stressé, les nouveaux stimuli venaient le tranquilliser, ou s’il se trouvait trop apathique, ils servaient au contraire à l’exciter.

Dans le projet de Anika Mi, le participant entrait en résonance à/avec l’environnement ; il s’élargissait à la dimension organique et maternelle de celui-ci et, via un processus d’enaction, ou de co-détermination, il le devenait littéralement. Pour l’artiste, cette mise en résonance était de l’ordre d’une simulation des processus co-dynamiques (de nature incarnée et empathique) en jeu entre soi et autrui - l’environnement.

De 2004 à 2009, dans la version effective de cette poche humaine devenue cabine interactive - "Le Labo Corps-Mental" -, l’artiste put intégrer un système dit multi-agents de représentation (i.e. de l’I.A. distribuée). Visuellement, celui-ci se composait de multiples agents graphiques capables de restituer les signaux physiologiques de manière autonome, hétérogène et sensible à la variabilité aléatoire des stimulations de l’environnement. Ainsi, en temps-réel, ce scanner traduisait-il les dynamiques corporelles et émotionnelles de manière certes artistique, mais aussi interprétable.

Via l’état modifié de sentience et/ou de conscience du visiteur-acteur, l’installation invitait également celui-ci à une expérience d’ordre intime, psycho-spirituel et psycho-thérapeutique — comme en rêve éveillé. 

Encadrés de près par l’artiste, près de 300 participants ont ainsi pu profiter du dispositif, en France et au Mexique. »

Texte de Léa Dédola, Docteure en Etudes audiovisuelles et cinématographiques.
Ouvrage aux Eds Presses des Mines : "Les émotions dans les créations artistiques : Arts interactifs et films de réalité virtuelle". (parution : février 2024)

[ VIDÉO - 6'03" ]
"Corps Foetal - Corps Mental • Le Corps Amoureux - La Poche Humaine" (bande démo).
Production : CICV Pierre Schaeffer (1999), Pierre Bongiovanni. Images de synthèse : Patrick Zanoli.
Au terme d'une résidence d'écriture de deux années (1997-98).


[ VIDÉO - 7'01" ]
Développement logiciel du continuum (IA distribuée, 2004) : Stéphane Sikora.
Réalisation visuelle : Anika Mi. Univers musicaux : Michel Redolfi.


[ VIDÉO MUETTE - 16'36" ]
Labo Corps-Mental : "La Part de la Douleur" • CENART - Mexico (juillet 2009).
Capture depuis le PC (à la source de la génération des images) + à partir de la physiologie de l'auteur.
Développement logiciel du continuum (IA distribuée, 2008-2009) : Stéphane Sikora.
Conception, performance chorégraphique des incrustations vidéo et réalisation visuelle : Anika Mi.


[ VIDÉO - 11' ]
"Animale"
Festival "+ si affinité ' Transrituel 2" - Fiac, Tarn (juillet 2008).
Performance et voix : Anika Mi.
Poèmes et voix : Mefistot et Sabine Bernaud.
Nappes sonores : Michel Redolfi.
[ VIDÉO MUSICALE - 6'04" ]
CENART - Mexico (juillet 2009).
En vis-à-vis, 4 extraits de "mondes" aléatoires.
Conception, performance chorégraphique des incrustations vidéo et réalisation visuelle : Anika Mi.
Univers musicaux : Michel Redolfi.

Ci-dessous : Un diaporama de 2009 décrivant mes travaux numériques tant dans leur approche artistique que théorique - cette dernière se référant à certaines modélisations en sciences cognitives, en particulier celles du biologiste et neuro-phénoménologue Francisco Varela (+ 2001).

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